Le
principe est simple : à la violence doit répondre la Justice.
Il
est indispensable d’agir avec méthode, et il est hors de question de se
satisfaire d’actions symboliques. Dès lors qu’il existe un moyen
d’action, c'est-à-dire des arguments juridiques qui correspondent à une
situation de fait, il est normal de s’engager. Et dans la mesure où nous
agissons sur le strict terrain du droit, en fonction des textes internationaux
et fondamentaux les plus établis, notre action doit être conduite avec fermeté.
De
plus, nous devons distinguer l’efficacité immédiate, sachant combien il est
difficile d’être entendu au milieu de ce fracas, et les perspectives qui se dégagent
à moyen terme dans une perspective de construction de la jurisprudence. Il
s’agit, au fil du temps, d’imposer cette réalité : les Etats gardent
toujours de très larges marges de manœuvre, mais il en existe une qui ne peut
être franchie, et qui est le crime de guerre contre les populations civiles.
Que les défenseurs du peuple palestinien se trouve au premier rang dans cette
lutte pour l’affirmation du droit est un message de grande portée.
Bien
entendu, la confrontation des idées et l’alliance des compétences sont
hautement souhaitables. Une démarche juridique peut faciliter les
regroupements, car le droit est naturellement fédérateur.
1.
La Cour pénale internationale
Les
Conventions de Genève (1949) et de Rome (CPI-1998) rappellent l’obligation
des Etats de poursuivre les criminels de guerre, car ces crimes vont courir un péril
à la paix. C’est exactement ce que dit le préambule de Rome (CPI- 1998).
En
quelque sorte, Rome (CPI- 1998) se voulait un décalque de l’ordre juridique
interne : les citoyens de l’ordre international constatent des faits qui
s’apparentent à des infractions, et ont l’obligation de dénoncer auprès
des autorités de poursuites.
Mais
la CPI reste fragile : non reconnue par les Etats-Unis, la Russie, la Chine,
Israël et tant d’autres, dont l’immense majorité des pays arabes. La
France a d’ailleurs, en réalité, été dépassée par son idée, et a ratifié
à regrets… Alors, la donnée majeure est une immense réserve pour saisir
cette Cour, sachant qu’en bout de course la solution est diplomatique et pas
juridictionnelle.
Nous
savons que la France est certainement prête à renoncer à son engagement au
motif de garder des bonnes relations, et pour garder la main au lieu de prendre
le risque de se dessaisir au profit d’une juridiction. De même, le Conseil de
Sécurité verrait les votes de veto des membres permanents, opposés au
principe même de la CPI.
Mais
ce blocage annoncé ne doit pas empêcher d’agir avec détermination et force.
-
La mondialisation du droit est une œuvre de longue haleine, mais qui est inéluctable,
d’autant plus qu’elle permet d’identifier un fonds juridique universel
avec les droits fondamentaux. Donc, ces initiatives sont nécessaires, et
c’est un rendez-vous attendu pour le peuple palestinien dans son combat pou
obtenir un Etat
-
Les plus hautes autorités (ONU et nombreux chefs d’Etats) en utilisant les
mots de riposte disproportionnée, avec nombre de victimes civiles, se placent
sur le terrain du crime de guerre. Il va à terme devenir difficile de soutenir
qu’existe une CPI mais qu’il ne faut surtout pas la saisir. Les
contradictions ne sont pas du coté des plaignants, mais des Etats qui
n’assument ni leurs engagements, ni la portée de leurs paroles.
Les
démarches sont appelées se poursuivre.
-
Il faut envisager un recours contre l’Etat français en cas d’inaction,
contraire à ses engagements internationaux, et à nombre de déclarations sur
les droits de l’homme. Il y aura des contradictions à assumer publiquement, même
si là encore, la marge de gain devant le Conseil d’Etat est restreinte. Le
problème de cette incohérence entre le discours et l’action doit être posé
au meilleur niveau.
-
Surtout, d’autres pays notamment l’Afrique du Sud et le Costa Rica ont été
très fermes au Conseil de Sécurité pour dénoncer les violations du droit
international. Or ces pays ont signé le Traité de Romme. Les associations
doivent animer les réseaux dans ces pays, pour les convaincre de porter
plainte.
Au
final la question est simple : alors qu’existe une CPI instaurée pour juger
les crimes de guerre, peut on soutenir qu’il est impensable de la saisir quand
des crimes de guerre se commettent sous les yeux du monde entier ?
A
terme, la Cour aura elle aussi à prendre position sur cette question, sauf à
devenir la Cour pénale internationale des pauvres, et à fragiliser considérablement
les procédures dont elle s’occupe (et donner de précieux arguments en défense
aux personnes poursuivies).
A
ce jour, nous avons reçu une quarantaine mandats, et votre soutien va compter
pour décider nombre d’associations ou de groupes à rejoindre cette
initiative. Dès demain, nous attendons de nouvelles réponses.
Des
contacts ont en cours à l’étranger. Il me semble également qu’il serait
intéressant de joindre plusieurs nom d’avocats, venant pourquoi pas de l’étranger.
Vous disposez certainement de contacts qu’il serait utile de favoriser. Cette
démarche ne requiert pas de condition stricte de recevabilité s’agissant de
plaignants, et c’est l’occasion d’un réaction très fédératrice. Tout
doit être fait pour rendre cette action exemplaire.
J’ai
eu trop peu de temps pour étudier vos remarques sur le projet, de plainte, mais
suffisamment pour vous dire qu’elles me paraissent bien venues. Je pourrais
vous répondre en détail demain après-midi.
2.
Plainte dans le cadre de la compétence universelle
J’ai
appris que des plaintes avaient été déposées dans le cadre de la compétence
universelle, notamment devant les juridictions espagnoles. La France ne reconnaît
pas la compétence universelle hormis pour les actes de torture. Si de tels
faits étaient avérés, nous pourrions aussitôt agir devant les tribunaux français.
3.
Plainte individuelle
Une
victime de nationalité française peut porter plainte au pénal devant un Juge
français, si elle est victime d’un crime commis à l’étranger par des
personnes qui ne sont pas de nationalité française. Ainsi, des personnes qui
auraient perdu un membre de leur famille dans le cadre de l’attaque israélienne
peuvent déposer plainte devant le Procureur de la République. Cette démarche
est souhaitable. Elle pourrait avoir un grand impact public, et immédiat.
4.
Accord de partenariat privilégié entre l’Union Européenne et Israël
Depuis
1995, l’Union Européenne a conclu avec Israël un accord d’association
comme cela existe avec nombre d’Etats. Cet accord est entré en vigueur en
2000. Pendant ses 6 mois de présidence de l’Union Européenne, la France a
tout fait pour dépasser ce cadre, et faire accepter un accord de partenariat
privilégié de grande importance politique et économique. Le Parlement européen
saisi début septembre pour un vote indicatif avait différé le vote, estimant
qu’aucune garantie n’était donnée sur le respect des droits de l’homme.
Sous la présidence française, le Conseil Européen est passé outre et le 8 décembre
2008 a adopté cette décision de partenariat privilégié qui doit prendre
effet à partir d’avril 2009. D’après les textes, ce statut repose sur le
partage de valeurs communes, notamment en matière de démocratie, de libertés
fondamentales et de respect des lois humanitaires internationales.
Une
personne physique ou morale a la possibilité de contester les décisions du
Conseil devant le tribunal de première instance de Bruxelles dans le délai de
deux mois. Ce recours en annulation peut être assorti d’un recours en référé
aux fins d’obtenir la suspension de l’acte.
Ce
recours serait particulièrement bienvenu, car il est destiné à entrer en
action au mois d’avril 2009. Ainsi, il faut en demander d’abord la
suspension puis l’annulation du fait des graves violations du droit
international humanitaire. De jurisprudence constante, la Cour de justice des
communautés retient que « le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante
des principes généraux dont la Cour de justice assure le respect. » Cette
action n’a rien d’évident, mais elle doit être conduite. Elle parait
opportune et nécessaire.
Un
groupe d’avocats se met en place sous l’autorité de la Délégation générale
de la Palestine. Nous veillerons à faire circuler de l’info validée.
Gilles
Devers
Cette page a été mise à jour le vendredi 16 janvier 2009