La laïcité

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Et si on parlait enfin vraiment de la laïcité ?

 

Au cours du débat sur le « voile islamique », on en a beaucoup parlé, sans jamais dire en quoi consistait cette « laïcité à la française », qui n’aurait pas d’équivalent dans d’autres pays.

Puisqu’elle n’est pas comparable à celle de la Turquie kémaliste ou de tout autre pays dépourvu de concordat, de religion d’État ou d’Église établie, qu’est–ce donc ?

Il ne peut s’agir d’une attitude individuelle, philosophique, face aux religions révélées ou non, car ce serait aussi une quasi-religion.

On est donc bien obligé de définir la laïcité française par rapport à l’histoire institutionnelle de notre pays.

Les règles de droit.

Le terme de laïcité apparaît principalement dans deux textes :

Les lois « Ferry » qui instituent l’école républicaine, gratuite, obligatoire et laïque, c’est-à-dire qui n’enseigne pas de morale religieuse. Le journée du jeudi est toutefois libérée pour permettre l’enseignement religieux en dehors des locaux scolaires.

La Constitution de 1958 précise que la France est une république laïque, sans donner de définition.

Sans que ce mot y soit employé, il faut signaler deux autres textes :

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, après une brève référence à « l’Être suprême », fait du peuple et de ses représentants la seule source des normes de la vie sociale, puisque la liberté religieuse est subordonnée au respect de l’ordre public défini par la loi (article 10).

La loi de séparation des Églises[1] et de l’État en 1905, qui édicte que :

Article 1 La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public.

Article 2  La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte.

La République ne s’occupe donc plus de l’organisation des cultes, simple affaire privée et confiée à des associations « ad hoc ».

Dans son avis du 27 novembre 1989, souvent cité mais rarement analysé complètement, le Conseil d’État vise au préalable une vingtaine de textes normatifs, nationaux et internationaux, concernant la compatibilité entre les règles de la vie scolaire et les « lois laïques ».

Leur application concrète.

Elle est souvent très éloignée des principes :

Les lois laïques ne s’appliquent toujours pas en Alsace-Moselle et personne n’envisage sérieusement de les y appliquer.

Sur le reste du territoire, elles sont souvent battues en brèche[2], et certains opposants au port du voile islamique au nom de la laïcité sont beaucoup plus discrets sur ces points.

Pas de norme religieuse au-dessus de la volonté populaire.

La France a connu des conflits violents avec l’Église catholique sur toutes les questions de vie du couple et de procréation (divorce, contraception, IVG). Les Églises ne se contentent pas de défendre leur point de vue comme n’importe quel groupement de citoyens, mais cherchent à faire prévaloir la prééminence de leur point de vue sur la volonté populaire majoritaire[3] contraire.

Le débat sur la future constitution européenne est significatif. Il ne s’agissait pas simplement de constater que l’héritage culturel commun européen est aussi religieux, et de plusieurs religions, mais pas seulement religieux, car dans ce cas, le plus compliqué aurait été de trouver une formule qui associe saint Benoît, Averroès, Spinoza, Marx, etc.

La volonté du Vatican était de « chapeauter » la Constitution européenne par une référence au christianisme, ce qui aurait permis ensuite de récuser les initiatives (éthiques, etc..) jugées contraires[4].

Les médias généralistes ont peu parlé de ce sujet.

Les grandes religions tentent également en France d’être représentées dans toutes les commissions et groupes de travail portant sur des questions d’étique et de constituer des groupes de travail.

L’État n’organise pas les religions.

Les différents ministres de l’intérieur depuis plus de 10 ans ont tous cherché à avoir des interlocuteurs « représentatifs » des musulmans français, et le dernier a réussi à mettre en place un organisme unique interlocuteur des pouvoirs publics.

Même si les objectifs recherchés sont louables, il faut bien reconnaître que ce n’est pas au ministre d’une république laïque de désigner le représentant des musulmans français.. Monseigneur Lustiger a salué ce travail en concluant que l’islam était devenu une religion d’État..

Séparation de l’enseignement et des Églises.

Pour l’Église catholique, l’enseignement catholique est une institution chrétienne à son service.

Les motivations des parents qui y placent leurs enfants en sont souvent très éloignées et beaucoup plus consuméristes.

Mais il faut constater que la République assure l’essentiel des frais de fonctionnement d’une institution officiellement religieuse, qui navigue entre l’obligation[5] d’accueillir tous les élèves et le respect de son « caractère propre » par les parents et enseignants.

Pas de financement public des cultes.

Les entorses à ce principe sont nombreuses.

Lieux de cultes.

Les évêques français ont, sur ordre du pape, refusé en 1905 de créer les associations cultuelles attributaires des édifices du culte. Ceux-ci sont donc restés propriété publique, tout en étant mis à disposition des fidèles.

Alors que les juifs et protestants français ont joué le jeu et doivent entretenir eux-mêmes les lieux de culte qui leur ont été attribué à cette occasion, l’Église catholique est déchargée de ce soin pour tous ceux construits avant 1905.

Les musulmans français comprennent mal pourquoi, au nom de la laïcité, ils ne peuvent obtenir d’argent public pour la construction de lieux de cultes, alors que celui-ci finance largement l’entretien des lieux de culte existants, sans compter les subventions détournées à la construction de nouveaux ( cathédrale d’Évry, etc..).

Dépenses de fonctionnement.

Depuis 1987, les versements aux associations cultuelles permettent d’obtenir des réductions d’impôt (dons aux oeuvres). L’État supporte donc 60 % du coût de fonctionnement des Églises.

La « Sécu des curés ».

Pour des raisons idéologiques, les prêtres catholiques[6], religieux et religieuses, n’ont pas le statut de salariés, contrairement aux pasteurs et rabbins, salariés d’associations « ad hoc » qui cotisent depuis longtemps au régime général et bénéficieront toujours d’un protection sociale, quelles que soient l’audience et les finances de leur confession.

Il a donc fallu depuis quelques années faire financer le régime de protection sociale du clergé catholique, en déficit croissant faute de fidèles, par le régime général de la Sécurité sociale.

Élargir le débat ?

Pour être crédible et non discriminatoire, la défense de la laïcité doit être globale. Mais dans tout ce qui a été évoqué supra, les militants anti-racistes peuvent avoir des positions très différentes.

rédigé en janvier 2004

[1] Le terme d’Église est employé dans la loi de 1905 et désigne non seulement les Églises chrétiennes, mais toutes les religions organisées, y compris juive ( en 1905) et musulmane..

[2] A tort ou a raison, mais ce n’est pas le rôle du MRAP. En effet, des Etats, sociétés, partis ou mouvements laïques peuvent être racistes, et des régimes concordataires ou avec des Églises établies ne pas connaître de racisme de ce fait.

[3] Il y a de fait conflit car la « base » religieuse ne suit pas ses dirigeants sur ces questions.

[4] C’est-à-dire une version édulcorée du modèle politique iranien.

[5] Non respectée par certaines écoles confessionnelles subventionnées.

[6] Sauf les enseignants sous contrat et ceux sous régime concordataire.

 

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